Promenade-artistique
Parcourir Paris et ses environs, crayons et pinceaux à la main !
Pratique artistique (suite) - 4. Au travail - 5- et après...
4. Au travail
4.1. Il me manque du matériel !
Voir la rubrique « matériel ». C’est une check-list utile à relire avant le départ.
Ceci dit, s’il vous manque quelque chose, faites preuve d’imagination pour compenser le manque.
Pas d’eau, une flaque. Pas de couleur, pas de pinceau, un dessin au crayon.
Pas de papier, un journal…
4.2. Je n’ose pas, je ne sais pas faire !
« Je ne suis pas peintre. Simplement je peins. A l’aquarelle », Anne Le Maître.
« Si tu sens au fond de toi une voix te dire : « Tu n’es pas un peintre »,
c’est là qu’il faut peindre, mon vieux, et cette voix par ce seul moyen se taira », Vincent Van Gogh.
Vous n’avez rien à perdre à tenter. Faites-vous plaisir ! C’est en forgeant que l’on devient forgeron.
Faites confiance à votre intuition, vos émotions, votre ressenti. Oubliez tous ces conseils et/ou relisez-les quand vous bloquez.
Le résultat n’est pas à la hauteur de vos ambitions. Vous allez pouvoir progresser. Ne jetez rien, datez votre travail. Vous pourrez bientôt mesurer vos progrès.
Regardez-le de nouveau. Y-a-t-il une partie que vous aimez ? Pourquoi ? Tirez-en profit pour une autre fois. Vous pouvez aussi cadrer uniquement cette partie.
Montrez votre travail pour avoir d’autres regards, des conseils.
Suivez des cours, inscrivez-vous à un stage.
Mais surtout persévérez. Et dites-vous que vous n’êtes pas seul : « Je regarde cette lumière qui inonde la terre, qui frémit sur l’eau, qui joue sur les vêtements, et j’ai des défaillances de voir combien il faut de génie pour saisir tant de difficultés », Eugène Boudin.
4.3. Je commence par quoi ?
Commencez par regarder. Pour bien faire, il faudrait regarder le sujet 80% du temps et seulement 20% sa feuille !
« Toujours le dessin se tiendra entre le monde et vous. Le rectangle de papier calé sur votre genou droit témoigne des mille liens tissés avec le paysage qui vous entoure, des mille coups d’œil nécessaires à la réalisation d’une perspective, à la compréhension des proportions au choix de la nuance juste ». Et Anne Le Maître ajoute : « Cette distinction entre la vision et l’observation – qui sait combien de marche il monte pour rentrer chez lui ? – m’a toujours beaucoup interrogée. Et pourtant : je vous prie de croire qu’il est excessivement difficile de peindre un escalier sans en connaître, non seulement le nombre de marches mais aussi de manière très précise, par exemple, dont la balustrade se raccorde à la rampe ».
Ensuite, demandez-vous pourquoi vous avez choisi ce sujet. Cela vous aidera à aller à l’essentiel pour transmettre ce que vous souhaitez.
Prévoyez une marge, pour que le dessin ne soit pas coincé dans la feuille.
Posez les grandes masses (voir la question « c’est trop compliqué ») ou démarrez du sujet central (même s’il n’est pas à placer forcément au milieu de votre feuille), ouvrez les lignes avec leurs orientations. Cadrez ensuite.
4.4. Faut-il dessiner avant de peindre ?
Tout dépend de votre aisance et de votre technique.
Les plus habiles peignent directement, souvent après avoir fait plusieurs croquis rapides avant de se lancer.
La plupart des amateurs dessinent avec plus ou moins de détails avant de peindre. Avec du bon papier et de l’aquarelle de qualité il est possible d’effacer son trait après avoir peint.
4.5. C’est trop compliqué à dessiner !
« On ne pourra bien dessiner le simple qu’après une étude approfondie du complexe », Gaston Bachelard. Regardez votre sujet et déterminez visuellement des lignes simples et des formes ou volumes essentiels pour caractériser le sujet. Supprimez les détails. Pour vous aider, plissez les yeux. Cela vous aidera à simplifier et à repérer les valeurs.
Posez sur votre feuille les grandes masses, les grandes lignes. Autrement dit, faites un dessin « primitif », la « carcasse » de votre sujet.
Suggérez avec quelques lignes. L'oeil saura reconstituer les parties manquantes. Laissez des zones floues. Travaillez dans l'humide.
Après être passé du compliqué au simple, vous pourrez passer du simple au compliqué en complétant votre dessin avec des détails. Invitez à la circulation du regard.
Sachez que le débutant en met généralement trop !
Votre peinture doit être évocatrice. Ce n’est pas une photo.
« D’ailleurs on ne peint pas une chose, en fait, on peint une émotion. Un lien. Le surgissement d’une rencontre. Ce qu’on entend lorsque, enfin, on se met à l’écoute », Anne Le Maître.
Une esquisse permet de se libérer des détails pour aller à l’essentiel à exprimer.
« Synthétiser ce n’est pas nécessairement simplifier dans le sens de supprimer certaines parties de l’objet : c’est simplifier dans le sens de rendre intelligible. C’est en somme hiérarchiser », Paul Cézanne.
4.6. Je fais comment avec cette perspective ?
Rappel : A la hauteur de vos yeux se trouve la ligne d’horizon.
Pour trouver l’orientation des lignes, tendez votre bras et positionnez votre crayon à l’horizontal (sans tricher, ne faites pas en fonction de ce que vous croyez, mais de ce que vous voyez) : vous verrez dans quel sens vont les lignes.
Les verticales restent verticales.
Les cercles ne sont pas forcément ronds sauf s’ils sont vus d’avion.
Vous voulez comprendre et vous rassurer, lisez cet article de randocroquis : http://www.randocroquis.com/laperspective.htm
4.7. Est-ce que je peux supprimer un détail, en ajouter d’autres ?
C’est la liberté de l’artiste. Peindre, ce n’est pas faire une photo. Ce n’est pas reproduire, c’est créer.
« Je crois que ce qui est important avec la photographie, c’est qu’elle a délivré la peinture et les peintres de la nécessité de l’exactitude ». Francis Bacon.
« Je ne me contente pas de reproduire un paysage. Lorsque je peins, je crée toute une histoire : si je peins un arbre ou un brin d’herbe, j’essaie de ressentir au plus profond de moi ces éléments », Abe Toschiyuki.
« Le propre d'un œuvre d'art est de rendre le caractère essentiel, ou du moins un caractère important de l'objet, aussi dominateur et aussi visible qu'il se peut, et, pour cela l'artiste élague les traits qui le cachent, choisit ceux qui le manifestent, corrige ceux dans lesquels il est altéré, refait ceux dans lesquels il est annulé », Taine.
Redisons-le, l’important c’est que votre peinture soit vivante.
4.8. Je commence par quelle couleur ?
A l’aquarelle, il convient de commencer par les couleurs les plus claires.
Pensez à préserver du blanc. Personnellement, je n’aime pas le « Drawing gum » dont la couleur verte est perturbante. Pour les détails blancs, j’utilise ensuite de la gouache ou de l’acrylique blanche, voir du « Typex ». Mais le mieux est de préserver le papier au naturel.
J’aime bien poser les grandes masses et reprendre ensuite par des lavis successifs. Travaillez dans le « mouillé », les couleurs fusent et fusionnent et créent de jolies surprises. Travaillez sur le sec si vous souhaitez plus de précision. Utilisez des techniques mixtes.
Expérimentez. « Les couleurs ont bien fait ce qu’elles voulaient, et le blanc du papier : avec l’aquarelle on ne sait jamais. Ce n’est jamais qu’un peu d’eau, un peu de lumière et beaucoup de plaisir », Anne Le Maître.
Documentez-vous, prenez des cours.
Le web regorge de conseils plus ou moins pertinents :
http://www.portail.aquarellissime.fr/-Accueil-
http://www.abc-apprendre.com/loisirs-creatifs/aquarelle.php
http://www.marichalar.fr/blog/articles-cat-92234-217692-dossier_technique.html
http://www.jacquier.org/technique-aquarelle.html
4.9. Je n’en peux plus !
Même avant de ne plus en pouvoir, éloignez-vous de votre travail. « De temps en temps, je pose mon carnet au sol, prenant ainsi du recul. C’est aussi le bon moment pour se dégourdir… », Cécile Fillette.
Détournez le regard de votre travail, revenez-y après une pause. Vous le redécouvrirez.
Vous pouvez toujours vous arrêter et reprendre plus tard. Mais attention aux lumières et aux ombres. Voir ci-dessus les questions autour de la météo.
4.10. Est-ce que c'est terminé ?
« Dans l’art, le mot « fin » ne vient jamais », Philippe Parreno. Donc à vous de décider.
Faites une pause. Regardez votre travail de loin. Clignez des yeux. Les ombres sont-elles bien posées ? Un accent est-il mis ? Le regard peut-il se poser quelque part et circuler ensuite ?
Ne regardez plus le paysage mais la cohérence de votre travail. Vous plaît-il ?
Vous pouvez aussi laisser reposer quelques jours pour déterminer s’il est finit ou ce qui doit être revu ou corrigé.
« Un tableau ne se termine jamais, tout comme il ne se commence jamais. Un tableau, c’est comme le vent : quelque chose qui avance toujours, sans repos », Joan Miro.
4.11. Je n’ai plus le temps !
Ne soyez pas trop ambitieux quand vous commencez. Limitez le sujet. Si vous choisissez un petit format, la mise en couleur sera plus rapide.
Utilisez la technique « Delacroix » (voir le point 1, question « il pleut »).
Prenez une photo (voir le point 5, question « prendre une photo »).
4.12. J’ai besoins de trucs.
Les meilleurs seront ceux que l’expérience vous aura permis de construire.
Mais si vous en voulez quelques-uns rendez-vous sur le site randocroquis : http://www.randocroquis.com/trucs.htm
La nature a ses trucs:
- la nature ne se répète jamais. Ne peignez jamais plusieurs fois le même arbre.
- Les arbres ne sont jamais plus clairs que le ciel. On voit toujours du ciel à travers les arbres.
- La partie la plus sombre d'un nuage est la plus éloignée du soleil mais sera plus claire qu'un élément sous la ligne d'horizon.
- Les reflets dans l'eau sont plus sombres que ce qu'ils reflètent.
D'une manière générale, commencez par votre sujet principal.
5. Et après
« Tout ce qui est peint directement et sur place a toujours une force, une puissance,
une vivacité de touche qu’on ne retrouve plus dans l’atelier »,
Eugène Boudin.
5.1. Prendre une photo, est-ce que cela peut m’aider ?
Les avis divergent sur l’utilisation de la photo.
« L’instantané photographique, apte à tout capter du monde en un centième de seconde
ne remplacera jamais le temps long du dessin qui dans ses traits emprisonne,
en même temps que ce jardin explosant de rosiers, les trente minutes passées à le dessiner,
un peu du mois de juin, une fraction de l’histoire du monde,
une demi-heure de la vie baignée dans ce parfum de roses », Anne Le Maître.
L’appareil photo enregistre toutes les informations. Il ne s’agit pas de copier ces informations mais de vous souvenir de l’ambiance que vous voulez transmettre à partir du sujet. Et tant pis si ce n’est pas conforme à la réalité mais proche de vos souvenirs. Voyez la technique de Delacroix.
Mais certains ont besoin du « modèle » pour finir leur travail. « Quand j’arrive sur un lieu que j’ai choisi, c’est avec gourmandise que je cherche le ou les points essentiels et les angles de vue qui vont guider mes choix. Mon regard va sans cesse de droite à gauche, pour capter ce qui sera retenu et rejeter ce qui ne le sera pas. Tour à tour, le sujet va être ciblé, puis successivement vont être étudiées la lumière, la composition, les valeurs. C’est alors que je fais un croquis, où l’harmonie de la composition est essentielle. Ce dessin préparatoire en noir et blanc sur le motif facilite l’organisation de mon travail. Tout est calculé : proportions, perspective, arrangement des formes, valeurs, ombre et lumière. Quelques photos seront ensuite utiles pour avoir certains détails. Tout est alors prêt pour finir mon travail en atelier », Christian Dagonet.
5.2. Est-ce que je peux corriger des erreurs ?
A l’aquarelle c’est difficile. Vous pouvez
-
Passer un pinceau ou une éponge humide sur la partie à modifier pour « la laver ». Absorbez alors avec un essuie-tout.
-
Tenter un grand lavage de la feuille en la faisant tremper rapidement dans une bassine d’eau.
-
Tenter d’effacer en utilisant une « éponge qui efface les traces » vendue au rayon « produits d’entretien » des grandes surfaces.
-
Gratter avec précaution une petite surface si votre papier est de très bonne qualité.
-
Mettre l’accent ailleurs, pour attirer le regard sur un autre endroit.
-
Choisir une couleur couvrante, voire de la gouache ou de l'acrylique.
5.3. Et quand c’est fini ?
Mettez la date et le lieu du sujet. Plutôt au dos de la feuille pour que votre peinture s'apprécie sans ces notations.
Conservez votre œuvre dans un carton, faites un accrochage, un carnet de voyage, ou encadrez-la.
Regardez vos œuvres de temps en temps. Faites une exposition chez vous et invitez des amis au vernissage.
Personnellement, j’ai un fil dans mon bureau. Avec des pinces à linge, j’accroche mes dernières œuvres pour en profiter et je les change au fur et à mesure des nouveaux travaux.
Lire: "Mise en valeur".
Références
Christian Dagonet, Les bords de Seine à l’aquarelle, ed. Ouest France, 2012
Delacroix, Croquis d’Orient, Poids plume, des livres à poster, 2000
Michel Duvoisin, Créez et composez votre carnet de voyages, Fleurus, 2002
Cécile Fillette, Carnet de voyages, l’art de les réaliser, Dessain et Tolra, 2010.
Anne Le Maître, Les bonheurs de l’aquarelle, petite invitation à la peinture vagabonde, collection petite philosophie, Baladéo, 2009.
Antonia Neyrins, Carnet de voyage mode d’emploi, Sépia, 2010
Thomas Schlesser, Conseils à un jeune peintre, aphorismes d’artistes de Léonard de Vinci à Jeff Koons, Arléa, 2009
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